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Les origines du Taekwondo

La période des Trois Royaumes

 

L’histoire de la Corée est longue, puisque le premier royaume de Corée, Ko-Choson,

serait né en 2333 av. J.-C. Son fondateur était Dangun, fils de, selon la légende, Hwanung (lui-même fils de Hwanin, dieu du Ciel) et Ungnyeo, une ourse transformée en femme.

 

Carte des 3 royaumes à la fin du Vème siècle : Silla, Paekche (ou Baekje) et Koguryo. Kaya était une confédération de villes-états fortifiées.
Carte des 3 royaumes à la fin du Vème siècle : Silla, Paekche (ou Baekje) et Koguryo. Kaya était une confédération de villes-états fortifiées.

 

Nous allons donc nous intéresser en particulier à une période un peu plus réduite dans le temps, mais couvrant tout de même 10 siècles :

  • D’abord, la période des Trois Royaumes (du Ier siècle av. J.-C. au VIIe), durant laquelle les royaumes de Silla, Paekche et Koguryo cohabitent.
  • Puis la période Silla qui l’a suivie (du VIIe au Xe siècle), durant laquelle la Corée est unifiée, le royaume de Silla ayant annexé les 2 autres.
Le Bouddha de Sokkuram (dynastie Silla). Notez la position des gardes à gauche et à droite, qui rappelle Keumkang Makki

 

 

 

Plus précisément, on va s’intéresser aux systèmes éducatifs militaires de ces deux périodes, parce qu’elles marquent l’essor d’une longue tradition d’arts martiaux coréens, dont le Taekwondo est en quelques sortes l’un des descendants.

 

 

 



Les Hwarangs à Silla

 

Les Hwarangs (ou Sonrangs) sont une confrérie militaire du royaume de Silla.


Le terme Hwarang signifie littéralement « Jeunes gens fleur » ; on pourrait le traduire par « la fine fleur de la jeunesse », mais l’expression, même si elle signifie pour une part l’élite de la jeunesse, ne se limite pas à cela.

En effet, les Hwarangs alliaient l’excellence militaire, intellectuelle et artistique : la beauté de la fleur sert ainsi à décrire l’autre versant du corps militaire. Le Hwarang-Do (où Do signifie « voie ») est ainsi « la voie de l’humanité florissante », car cette excellence individuelle devait profiter à toute la communauté.

Un combat de Sireum. (peintures murales de Gakjeo Chong, dynastie Koguryo)

 

La pratique des arts martiaux et du système Son Bae (copié du Koguryo) se généralise au IVe siècle dans l’instruction militaire et permet de sélectionner des corps d’élite. Ces groupes de guerriers d’élite sont appelés Hwarang-Do : ceux originaires de la noblesse forment les cadres et sont appelés Hwarangs, et leurs disciples et suivants Nangdos. Ils sont créés par le 24e roi de Silla, Chin Heung.

 

 

 

Après une sélection par concours, les Hwarangs vivent en groupes.

Ils s’instruisent aux arts suivants :

  • Gungsa : le tir à l’arc
  • Tuho : les projections
  • Chilgeuk : les coups de pied
  • Kak Choo : un autre type de projections
  • SooBahk : les coups frappés
  • Gisa : le tir à l’arc pratiqué à cheval
  • Taekkyon : un autre type de coups de pied
  • Suryeop : la chasse et la pêche
  • Cho Chum : la natation
  • Geom Sool Bop : le sabre coréen
  • Sireum : lutte

 

L’initiation au confucianisme fait aussi partie de l’éducation donnée aux Hwarangs, les Hwarang-Do formant non seulement une élite guerrière, mais aussi intellectuelle et administrative. La beauté et l’intelligence ainsi que la maîtrise de la littérature comptaient autant que l’excellence dans la maîtrise des arts martiaux. L’entraînement incluait également des cours de musique et de danse.

 

Les Hwarangs avaient également une activité civile importante : ils construisaient les infrastructures (routes, ponts) nécessaires à la prospérité du royaume. Sur les trente Hwarangs connus des sources, peu restèrent définitivement militaires.

 

Le Hwarang-Do est autant une éducation au combat qu’un mode de vie imprégné de philosophie confucianiste, et un code de conduite est donné aux Hwarangs : c’est le Hwarang-o-kae. La loyauté envers le souverain est une des vertus exigées des Hwarangs, avec le courage au combat, le respect des aînés, un dévouement à toute épreuve envers les camarades.

 

Aussi bien chez les Hwarangs que dans les Son Bae de Koguryo, les valeurs morales furent placées au premier rang. Les actions profitant au groupe aussi bien qu’à l’individu sont seules considérées comme bénéfiques.

 

Les Hwarangs jouent un rôle fondamental dans l’unification de la Corée sous l’égide du royaume Silla, notamment lors des alliances stratégiques, d’abord avec Koguryo pour éliminer Paekche, puis avec la Chine des Tang pour éliminer Koguryo.

Parmi l’élite que sont les Hwarangs, les Sool Sa (« cavaliers de la nuit ») sont une élite supérieure, qui est instruite dans l’art du Un Shin Bop, le combat caché. Ce combat caché est en fait l’espionnage et la diplomatie, et comprend l’art de la dissimulation, l’art de l’infiltration, l’art de se déplacer sur n’importe quel terrain (y compris dans les arbres), et l’art d’utiliser son esprit.

 

Les Pyung Dang au Koguryo

Un combat de Soo Bahk ou de Taekkyon (peintures murales de Muyang Chong, dynastie Koguryo)
Un combat de Soo Bahk ou de Taekkyon (peintures murales de Muyang Chong, dynastie Koguryo)

 

Dans le Koguryo, on nomme cette institution Son Bae ou Pyung Dang (signifiant approximativement « homme vertueux qui ne bat jamais en retraite «). Créée en 372, elle vise à produire des combattants experts et succède aux écoles d’art martiaux enseignant le SooBahk et le Taekkyon. C’est d’ailleurs le SooBahk qui est l’ancêtre des arts martiaux du Silla. Les guerriers du Silla y sont initiés après une guerre commune de Koguryo et de Silla contre les pirates japonais.

 

Après une sélection, ces jeunes gens célibataires sont formés aux arts martiaux et à la littérature classique chinoise.

Les principales disciplines enseignées étaient :

  • Gungsa : le tir à l’arc
  • Geom Sool Bop : le sabre coréen
  • Gisa : la course à cheval
  • Dangeom Sool : l’art du lancer du couteau
  • Jjireugi : les coups frappés et les coups de pied
  • Suyeong : la natation et le combat aquatique
  • Pungryu : la musique, y compris le tambour et le gong
  • Suryeop : la chasse et la pêche
  • Jeongchiwa Gojeon : l’étude des littératures classique et politique

 

Les meilleurs élèves sont versés dans le corps des Sun Bi (« guerriers braves et intelligents »). Ce corps d’élite a pour signe distinctif le port de cinq dan kum (des couteaux courts) et d’une pierre à aiguiser.

Ils participent à des tournois, dont les épreuves comprennent le combat à mains nues, avec des pierres, la chasse et le tir à l’arc. Les vainqueurs jouissent d’une grande renommée dans le royaume.

 

Les Kukson du Paekche

« L’homme fort » (peintures murales de Samsil Chong, dynastie Koguryo)

 

À Paekche, l’institution de formation des élites est créée en 320 par le roi Bi Ryu. Elle avait lieu dans un bâtiment dédié à cet usage à l’ouest de la capitale.

 

Les principales disciplines d’entraînement sont :

  • Gisa : la course à cheval ;
  • MokBong : le combat avec le bâton de bois ;
  • Geom Sool Bop : le sabre coréen ;
  • Soo Sool : le combat à mains nues ;
  • Jung Dae Bop : la défense contre les attaques de plusieurs adversaires ;
  • Busu : les sutras bouddhistes ;
  • Gojeon : la littérature classique.

 

 

Le Soo Sool est un des arts martiaux les plus anciens et les plus évolués de Corée. Des tournois avaient lieu chaque mois les nuits de pleine lune afin de garder les guerriers au meilleur de leur forme.

 

 

Le Taekwondo moderne

  • La création

 

Bien que ses origines soient très lointaines, le Taekwondo est un art martial jeune, puisqu’il a vu le jour en 1955.

 

Mais revenons quelques décennies en arrière. Depuis la fin du XIXe siècle, le Japon, mené par son empereur Mutsuhito, est dans une période d’expansion extérieure. Après s’être imposé face aux Chinois en 1895, puis aux Russes en 1905, le Japon annexe entièrement la Corée en 1910.

A partir de cette date, les arts martiaux coréens sont décrétés hors-la-loi, et sont remplacés par le Judo et le Karaté. Néanmoins, ils survivront dans l’ombre, jusqu’à la libération en 1945, à la fin de la IIe Guerre mondiale.

Coupure de presse relatant la réunion du 11 avril 1955
Coupure de presse relatant la réunion du 11 avril 1955

La Corée étant maintenant libre, le « Mouvement pour la Restauration de l’Originalité Coréenne » se crée. Comme son nom l’indique, le but est de restaurer une identité coréenne, qui a été occultée par la longue occupation japonaise.

Le 11 Avril 1955 se tient une commission réunissant des historiens, des politiciens, et des experts en arts martiaux coréens. Le but est de recréer un art martial national, en faisant une synthèse d’arts martiaux coréen tels que le Taekkyon, le SooBahk, le KwonBup, …

C’est le Général Choi Hong Hi qui a alors proposé le mot « Taekwon-Do » (Tae : le pied, Kwon : le poing, Do : la voie) pour désigner ce nouvel art, c’est pourquoi on le considère comme le père fondateur du Taekwondo, bien qu’il n’ait pas été le seul expert à y contribuer.

 

  • Développement et conflits

Le général Choi Hong Hi (1918-2002)

 

En 1959, le Taekwon-Do s’internationalise : le général Choi, suivi d’une vingtaine d’instructeurs, organise des démonstrations dans plusieurs pays. La même année est créée la première fédération de Taekwon-Do : la KTA (Korea Taekwon-Do Association), dont le Général est le président.

 

 

 

 

 

Le général Choi Hong Hi effectuant une casse de planche
Le général Choi Hong Hi effectuant une casse de planche

 

 

Quelques années plus tard, en 1961, alors qu’il a quitté l’armée, et est Ambassadeur en Malaisie, il est officiellement chargé par le gouvernement coréen de diffuser le Taekwon-Do dans le monde.

Hwang Kee (1914-2002)
Hwang Kee (1914-2002), du Tang soo do moo duk kwan

 

Mais dès son départ, des conflits refont surface.

En effet, hormis les militaires du Chung Do Kwan et Oh Do Kwan, peu pratiquaient le Taekwon-Do tel que l’enseignait le général Choi, et de nombreux maîtres, non satisfaits du nom « Taekwon-Do » continuent à enseigner sous d’autres noms comme le KongSooDo et le TangSooDo.

 

Ils ne sont d’ailleurs pas les premiers. En particulier, Hwang Kee, du Tang Soo Do Moo Duk Kwan, n’avait jamais vraiment adhéré à la KTA. Malgré « l’unification » en 1955, il a continué de son côté avec la Korea TangSooDo Association, renommée Korea SooBahkDo Association (KSA) en 1960. Rejointe peu après par le Jidokwan, la KSA sera pendant plusieurs années la principale rivale de la KTA.

 

Le président Sud-Coréen Park Chung Hee ordonne alors une réunification des écoles, et le 16 septembre 1961, une nouvelle réunion a lieu. Les différents représentants tombent d’accord sur le terme Tae Soo Do (« la Voie du pied et de la main »), et la KTA est renommée en conséquence Korea TaeSooDo Association.

À son retour de Malaisie, le Général Choi demande un vote pour rechanger le nom TaeSooDo en Taekwon-Do, ce qui a lieu le 5 août 1965. Les conditions de ce vote restent douteuses, car le nom Taekwon-Do, qui ne contentait pourtant que l’Oh Do Kwan et le Chung Do Kwan, n’a été choisi qu’avec une voix d’écart.

Les choses se poursuivent donc ainsi, bon gré, mal gré, jusqu’en 1966 où est créée la première fédération mondiale de Taekwon-Do : l’ITF (International Taekwon-Do Federation), dont le Général Choi devient là encore le président.

 

  • Les 5 écoles (styles) de Taekwondo et leur Maitre fondateur

 

  • Chung Do Kwan (Lee Won Guk)

  • Mu Do Kwan (Hwang Ki)

  • Song Mu Kwan (No Byung Jik)

  • Ji Do Kwan (Lee Jong Woo)

  • Yeon Mu Kwan (Jon Sang sob)

 

  • La scission

 

Les tensions se font de plus en plus fortes entre les membres de la KTA et le général Choi, car celui-ci ne reconnaît que les ceintures noires de l’Oh Do Kwan, son école, et du Chung Do Kwan, ce qui n’est bien sûr pas apprécié par les autres maîtres. De plus, il continue à faire évoluer son programme sans tenir compte des avis des autres instructeurs. La KTA commence donc à fonder un programme technique commun et nomme un comité de création de formes, duquel sortiront les poomsés encore utilisés actuellement (voir aussi l’historique des poomsés).

Puis, au début des années 1970, le général entreprend d’organiser une démonstration en Corée du Nord, où il est né (plus exactement, depuis la séparation Nord/Sud en 1953, sa région natale se trouve située en Corée du Nord). Son but n’était que de faire connaître le Taekwon-Do à « l’autre Corée », mais l’action n’est quoiqu’il en soit pas spécialement apprécié par le gouvernement sud-coréen du moment, et par-dessus le marché certains de ses adversaires voient là une occasion de prendre le contrôle du Taekwon-Do à l’échelle mondiale. A l’époque, le Taekwon-Do est avant tout un enjeu politique et non sportif !

En 1972, craignant pour sa propre sécurité, le général quitte la Corée, et s’installe au Canada, d’où il continue à diffuser le Taekwon-Do.

Côté sud-coréen, il n’est bien sûr pas question de continuer à pratiquer sous le même drapeau que celui du Général Choi.

En 1973, le Kukkiwon (quartier général mondial du Taekwondo) est inauguré, et la même année, à l’occasion des premiers championnats du Monde de Tae Kwon Do, est créée une seconde fédération mondiale, la WTF (World Taekwondo Federation).

 

Afin de marquer la différenciation, l’orthographe est modifiée et devient Taekwondo au lieu de Taekwon-Do.

 

Depuis, le Taekwon-Do ITF est considéré comme nord-coréen, et le Taekwondo WTF comme sud-coréen, alors qu’à l’origine tous deux ont été créés en Corée du Sud, et que la Corée du Nord n’a intégré l’ITF qu’au début des années 1980.

Historique du Taekwondo WTF et ITF

Pourquoi existe t-il deux styles (deux fédérations) de Taekwondo : l’ITF et le WTF ? Pour comprendre ce pourquoi, je vous propose de retourner dans le passé et découvrir l’historique du Taekwondo…

 

Le commencement, la période des 3 royaumes

 

Carte des 3 royaumes à la fin du Vème siècle : Silla, Paekche (ou Baekje) et Koguryo. Kaya était une confédération de villes-états fortifiées.
Carte des 3 royaumes à la fin du Vème siècle : Silla, Paekche (ou Baekje) et Koguryo. Kaya était une confédération de villes-états fortifiées.

Comme beaucoup d’arts martiaux, le taekwondo s’appuie sur une tradition très ancienne, et existait bien avant le Moyen Âge en Corée, à travers de nombreuses écoles, sous le nom de

Subak (수박), Subakhi, Subyok, Taekkyeon (태껸), Bikaksul, Subyokta et Gweonbeop (권법). Le passé du taekwondo est décelable à travers l’histoire orale et les objets issus de l’époque des trois premiers royaumes de Corée (Goguryeo (고구려), Baekje (백제) et Silla (신라)) ; ainsi, la découverte en 1935 par des archéologues japonais de deux tombes royales (sur les plafonds desquels sont représentés des techniques et des positions de combat) atteste sans doute l’existence d’arts martiaux originels dans le royaume de Goguryeo, d’autres trouvailles archéologiques allant dans le même sens.

Le passé historique du taekwondo est principalement retracé par les peintures murales des tombes royales de l’époque Goguryeo (royaume fondé en 37 av. J.-C. par Gojumong (고주몽), plus connu sous le nom de roi Dong Myeong Sung, et qui perdura jusqu’en 668). Les fresques de Muyang Chong et de Don Su-myo représentent des scènes d’entraînement, et celles de Samsil Chong montrent un homme dans une pose basique d’art martial. La datation historique de ces fresques oscille entre l’an 3 et l’an 427 de notre ère.

Une tribu qui avait fui de Goguryeo, Baekje, s’installa aux abords du bassin de la rivière Han (한). Le chef, Onjo-wang (온조왕), unifia toutes les tribus existantes et forma l’ancien royaume de Baekje en 18 av. J.-C. Comme dans les autres royaumes, les arts martiaux jouaient un rôle significatif dans la défense du pays. Ainsi naquit le susa (comparable au Hwarangdo de Silla). À cette époque, un autre prédécesseur du taekwondo, le subyokta, était pratiqué dans les villages du royaume sous la forme d’événement populaire, le gagnant des compétitions pouvant parfois devenir chef de village ou militaire. Ce fut néanmoins dans le plus petit des trois royaumes, Silla, que fleurirent les arts martiaux qui lui permirent de lutter avec plus ou moins de succès autant contre les attaques des royaumes voisins que contre celles des îles japonaises.

 

Graphies du mot taekwondo, en hangeul

Le royaume de Silla fut fondé par Park Hyuk Geosae en 37 av. J.-C. et perdura jusqu’en 935 de notre ère. Bien qu’en plus d’être le plus petit des trois royaumes, Silla fut une société dite « primitive », celui-ci influença directement la naissance du taekwondo. Au départ désorganisé, ce royaume devint sous l’impulsion de son fondateur le plus puissant des trois royaumes, notamment grâce au développement d’une armée unie et disciplinée (dont les valeurs ne sont pas sans rappeler celles des chevaliers des chansons de geste du Moyen Âge en Occident). Le Hwarangdo (화랑도) crée par le 24e roi de Silla était d’abord une organisation militaire d’élite constituée par des soldats ayant fait leurs preuves durant la bataille. Ces jeunes recrues, appelés Hwarang (화랑) (jeunes nobles, « chevalier à la fleur »), pratiquaient une nouvelle forme d’art martial codifié, parallèlement aux autres matières institutionnelles. Leur influence ne fut probablement pas sans conséquence sur l’histoire militaire du royaume qui put tant maintenir ses ennemis à l’écart qu’unifier la Corée en 688 ap. J.-C. Notons qu’à cette époque, les arts martiaux traditionnels coréens prirent une ampleur particulière dans les institutions.

En 935, alors que tombe le royaume de Silla, se met en place la dynastie Goryeo (고려), fondée en 918 par Wang Geon (왕건). Dans les mémoires de Goryeo, un art martial proche du taekwondo fut d’abord appelé subakhi. Populaire auprès du peuple de Goryeo, il est probable que, de même qu’auparavant dans les autres royaumes, les rois aimaient assister aux compétitions de subakhi et récompenser les gagnants. Il est de notoriété que l’université nationale de Goryeo et la plus grande institution éducative sur la pensée confucéenne de l’époque, « Gukjagam », enseignaient systématiquement le subakhi jusqu’au plus haut niveau. En outre, la dynastie connut un essor commercial qui permit les échanges culturels, dont le subakhi. Inversement, le royaume subit les influences d’arts martiaux étrangers.

 

De la création à la scission

général Choi Hong Hi, fondateur officiel du Taekwondo en 1955
Le Général Choi Hong Hi, fondateur officiel du Taekwondo en 1955

 

Le taekwondo est officiellement créé le 11 avril 1955 par le général Choi Hong Hi (최홍희), après un long travail de développement et d’unification des différentes écoles d’arts martiaux coréennes. C’est donc à la fois le fruit d’une longue tradition martiale et le fruit du travail d’un homme, le général Choi Hong Hi (최 홍 히), qui présida la réunion de 1955.

Ce dernier commence en effet sa pratique du taekkyon, un très ancien art martial coréen basé sur des techniques de jambes très complètes pendant sa jeunesse. Nous sommes dans l’entre-deux-guerres, et la Corée est encore sous la domination japonaise. Lorsque le jeune Choi part faire ses études au Japon, il rentre en contact avec le maître de karaté Funakoshi, sous la direction duquel il commence à pratiquer. De retour en Corée, il poursuit son travail sur le développement d’un nouvel art martial, combinaison du karaté et d’anciens arts martiaux coréens. Mais la Seconde Guerre mondiale éclate, et il est enrôlé de force dans l’armée japonaise. À la libération, son travail sur l’art martial continue. Mais la Corée est de nouveau plongée dans la tourmente du conflit idéologique entre Nord et Sud. Choi Hong Hi s’engage dans la toute jeune armée Sud-coréenne, qu’il contribue à fonder (il fait partie des « Pères fondateurs de l’armée coréenne »). Il commence alors à enseigner son art à ses troupes. Son but est de donner à une Corée meurtrie par l’occupation japonaise et la guerre un art martial national, mais aussi de fonder sur la base des derniers progrès scientifiques une pratique d’autodéfense rationnelle. C’est cet aspect scientifique qui donne sa spécificité première au taekwondo, puisque chaque mouvement est étudié en fonction des principes scientifiques dans le but d’obtenir le maximum de puissance.

L’équipe de démonstration de Taekwondo dirigée par Maitre Choi en 1959 au Viet Nam

Après la création officielle du taekwondo, le 11 avril 1955, des équipes de démonstration furent constituées. Composées des meilleurs représentants de cet art martial nouveau, elles avaient pour objet d’effectuer des tournées dans le monde entier afin de faire connaître le taekwondo. En mars 1959, une première tournée fit découvrir à Taïwan et au Sud Viêt Nam ce nouvel art martial.

 

En 1961-62, le taekwondo était pratiqué par les militaires coréens autant que par la population civile de ce pays, mais aussi par les forces armées américaines stationnées en Corée. Ces mêmes années, le taekwondo fut introduit à l’académie militaire de West Point (USA), l’une des plus réputées du monde.

Voici l’équipe de démonstration dirigée par Maitre Choi, réalisant la tournée de « promotion » du Taekwondo en 1965

Nommé ambassadeur en Malaisie, le général Choi introduisit le taekwondo dans ce pays, après avoir effectué une démonstration dans un stade à la demande du premier ministre Malais. En 1963, l’Association malaise de taekwondo fut créée.

En juin de la même année, une démonstration eut lieu dans le bâtiment des Nations unies, à New York, et le taekwondo fut choisi pour l’entraînement des militaires du Sud Viêt Nam.

Toujours en 1963, les associations nationales de Singapour et de Brunei furent créées.

En 1965, le général Choi prit sa retraite avec le grade de Général deux étoiles, et fut chargé par le gouvernement de Corée du Sud de diriger une tournée en Allemagne de l’Ouest, Italie, Turquie, Émirats arabes unis, Malaisie et Singapour. Les membres de son équipe de démonstration étaient Han Cha Kyo (VIe dan à l’époque), Kim Jun Kun (Ve dan), Kwon Jai Hwa (Ve dan) et Park Jong Soo (Ve dan).

Ce fut l’occasion de faire connaître le taekwondo dans ces pays, ainsi que d’établir les associations nationales qui, le 22 mars 1966 se réunirent pour former la Fédération internationale de taekwondo (ITF), à Séoul.

Les pays fondateurs de l’ITF sont donc la Corée, le Viêt Nam, la Malaisie, Singapour, l’Allemagne de l’Ouest, les États-Unis, la Turquie, l’Italie et les Émirats arabes unis. Le taekwondo fut alors reconnu comme l’art martial national de la Corée.

L’équipe de démonstration de Taekwondo en 1968 en France, à Paris

En 1968, le Général Choi visita la France à l’occasion du symposium sur le sport militaire et y organisa une démonstration devant les représentants de 32 pays. La même année, le Royaume-Uni forma une association nationale de taekwondo, et le général se rendit en Espagne, au Canada, aux Pays-Bas, en Belgique et en Inde. En 1969, le général effectua une tournée dans 29 pays afin de rencontrer les instructeurs de ces différents pays et effectuer les prises de vues qui illustrent la première édition de l’Encyclopédie (1972). L’année 1970 fut à l’image de 1969 : le général voyagea dans le monde entier pour faire découvrir le taekwondo et conduire des séminaires pour former des instructeurs ou perfectionner la technique de ceux-ci.

 

1973, une année charnière

Le Général Choi Hong Hi, Maitre fondateur du Taekwondo décéda le 15 juin 2002 à Pyongyang en Corée du Nord après avoir dédié sa vie entière au Taekwon-Do.

En 1972, le Général Choi introduisit le taekwondo en Bolivie, République dominicaine, Haïti et Guatemala. Mais confronté à une situation politique particulièrement difficile dans son pays, il fut contraint à l’exil : en effet, le gouvernement sud-coréen avait désapprouvé une initiative du général Choi de faire une démonstration de taekwondo en Corée du Nord, où il s’était rendu en 1966. Le développement du taekwondo en Corée du Nord est dû notamment à Yoon Byung-in.

 

Afin de ne pas perdre le taekwondo, et avec l’accord des pays membres de l’ITF, le général Choi déplaça le siège de l’ITF à Toronto, au Canada, d’où il espérait pouvoir diffuser plus aisément le taekwondo dans les pays de l’Est.

Le gouvernement de Corée du Sud, qui ne voulait pas, lui non plus, perdre le taekwondo, qui était devenu un extraordinaire outil de propagande pour le pays, créa la WTF (World Taekwondo Federation ou Fédération Mondiale de Taekwondo) en 1973.

Après un remaniement total des techniques, ce nouvel art martial, totalement différent du taekwondo créé par le général Choi, commença à se répandre dans de nombreux pays.

Bénéficiant de l’appui du gouvernement, cet art martial put se développer très rapidement, surtout dans les pays de l’Ouest.

Pascal Gentil, le double médaillé Olympique Français en Taekwondo WTF

Dès lors, les deux taekwondos cohabitent plus ou moins pacifiquement. Le maintien d’un seul nom pour désigner ces deux disciplines est à la base de nombreuses confusions, ces deux arts martiaux étant très différents dans les faits. Si le taekwondo du général Choi a poursuivi son évolution scientifique, celui de la WTF a pris une tout autre direction, celle de l’olympisme.

C’est ainsi qu’il fut reconnu sport olympique en 2000.

Précisons ici que cet art martial est encore fortement majoritaire en France, où l’ITF ne se développe de nouveau que depuis une dizaine d’années.